Voici 42 ans dans BEST, GBD l’aficionado de Meat Loaf et de son complice Jim Steinman tendait gaillardement son micro à Bonnie Tyler pour la sortie de ce qui allait sans nul doute constituer le plus gros hit de sa carrière, le mythique « Total Eclipse Of the Heart ». Autopsie d’un immense tube planétaire, avec une galloise pas galeuse pour un sou et flashback…
Après avoir rencontré Jim Steinman, puis son fameux poulain Meat Loaf, il me semblait logique de boucler la boucle et d’interroger leur toute dernière créature vampirisée au son du rock grandiloquent de ces héros de « Bat Out Of Hell ». Extrait de son 5ème LP « Faster Than the Speed Of Light », le puissant « Total Eclipse Of the Heart », que Jim Steinman qualifiait alors de un déferlement de sons et d’émotions à la Wagner », et de « pièce maîtresse pour la voix de Tyler », sera à jamais le plus grand tube de la chanteuse galloise qui a tout de même enregistré 18 albums, dont le dernier « The Best Is Yet To Come » publié en 2021.

BONNIE AND JIM
Tiens, Bonnie Tyler, j’ai déjà vu ce minois-là. Voyons, était-ce chez Rod Stewart, dans un bar de Memphis ou à une party de Dolly Parton ? Hum Hum… je crois bien que ça n’est rien de tout cela. Certes, elle n’a jamais chanté «Tea for the Tylerwoman », mais plutôt « It’s a Heartache » et, malgré son accent gallois, je l’ai toujours prise pour une diva country. Blonde, ronde, un peu vulgaire, depuis des années, Bonnie fait vibrer les cow-boys à peu près autant que « Oh Susannah ». Mais tout est cassé, tout est mort, cette fois Bonnie a tout claqué. Elle a bazardé son Stetson, pour signer un pacte avec Jim Steinman. Bien joué, « Total Eclipse of the Heart », le premier simple pilonne les charts : reconversion réussie. J’ai ramassé notre Tyler après une interview à Radio 7. Un peu endormie, elle m’a suivi dans un de ces salons de la maison de Radio France qui ressemblent à s’y méprendre à un hall d’aéroport. Moulée dans le cuir, chacun de ses gestes module un couinement sympathique. Manifestement, Bonnie n’a pas fréquenté les bancs de Cambridge ; quelle importance ? Rockandrollement parlant, elle se défend l’album est un produit sûr, regroupant des musiciens qui le sont tout autant. En s’abandonnant aux mains de Steinman, Bonnie ramasse un nouveau style clé en mains qui rappelle étrangement le Meat Loaf et ses nombreuses compagnes. L’interview est sans surprise, Bonnie recrache sa bio à la ligne près et, dès qu’on la pousse vers des questions plus personnelles, notre Tyler se ferme comme une huître. Résumé des épisodes précédents Bonnie made in Galles a le timbre qui colle à la country. Le genre n’est plus trop vendeur. Elle bazarde ses vieux mentors (manageurs, auteurs, compositeurs, éditeurs) pour Jim Steinman. Après Ellen Foley et Carla Devito, Bonnie adopte le look Meat :
« Jim était en tête de liste. » Bonnie s’explique :
« Je l’ai choisi parce que ses compositions sont passionnées, parfois jusqu’à l’orgasme. Dans le fond, je n’ai jamais eu la chance d’enregistrer des chansons qui me plaisent vraiment.
Quoi ? Pendant toutes ces années, tu as agi sous la contrainte ?
Tout est de la faute de mes anciens managers. Dès que mon contrat est arrivé à expiration, je me suis sauvée : ils voulaient m’enfoncer encore plus dans la country.
Quel est le budget de l’album ?
Oh… 111 000 livres (200 000 dollars, 1 332 000 francs… à peu près 100.000€), mais les vidéos sont superbes. »
À ce prix-là, c’est encore heureux. Bonnie vit dans le sud du Pays-de-Galles, elle rit très fort et bouffe un peu trop… sans rien sacrifier au naturel !
« Faut que je perde quelques kilos », plaisante-t-elle en se tapant sur le ventre. Super Fonda aérobiquez donc cette biiquette. « Speeder Than the Speed of the Night » est aussi réussi, me chantent le poids des charts et le choc des ventes, mais sans le moindre trait de génie. Allez, c’est toujours mieux que Kim Carnes !
Gérard Bar-David // gonzomusic.fr
Paru dans BEST 180, juillet 1983

